Luc Faye : "tout le monde nous attend"
Le 16/01/2006
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Franceolympique.com : Le snowboard-cross entre aux Jeux. C'est une bonne nouvelle ?
Luc Faye : Oui, c'est très positif. D'abord, car cela donne encore plus de crédit à notre sport. Ensuite, parce que le «Cross», cette discipline où les concurrents dévalent la piste de front, est très représentatif du snowboard. C'est une très bonne chose pour nous, plusieurs de nos athlètes étant au plus haut niveau mondial.
Comme se passe la préparation des Français ?
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Xavier De Le Rue dans une position qu'il affectionne : en tête... |
La préparation de nos athlètesse fait sur la Coupe du Monde. Pour le moment, nous ne déplorons que les blessures. Mais c'est le résultat de l'engagement de nos coureurs. Les sélections sont chères, les places à prendre sont de plus en plus rares, alors, c'est certain, ils se «tirent la bourre» et on ne peut par le leur reprocher. J'espère bien pouvoir compter sur la totalité des effectifs à Bardonecchia. Sylvain Duclos, par exemple, revient bien mais il manque encore de compétition. Deborah Anthonioz, qui s'était cassé le bras à Whistler début décembre, est encore dans le coup. On sait qu'elle peut réussir de grandes choses avec un minimum d'entraînement.
Vous engagez des jeunes en Coupe du Monde. Dans quel but ?
Oui, nous avons par exemple lancé Pierre Vaultier, 3e des championnats du monde juniors (avril 2005 à Zermatt) en «Cross» et il est tout de suite entré dans les minima, sélectionnable pour Turin. Et également Tony Ramoin, le champion du monde juniors. Les autres jeunes sont là pour progresser, pour se préparer à la prochaine échéance olympique, Vancouver 2010. Nous fonctionnons avec deux groupes, l'un qui prépare Turin, et l'autre qui vise au-delà.
Il semble que les Français sont moins dominateurs qu'avant en Cross. Et qu'en est-il du half pipe ?
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Doriane Vidal, triple championne du monde et vice-championne olympique de half pipe |
En Half Pipe, la concurrence internationale est importante. Il faut savoir que sur la Coupe du Monde FIS, il n'y a pas toujours les meilleurs. Ils y viennent réaliser les minima internationaux, c'est-à-dire marquer les points nécessaires, et repartent sur le circuit professionnel, le «Ticket to ride tour» (en référence à une chanson des Beatles). Par exemple, Mathieu Crépel a récemment gagné une compétition sur le «TTR» et c'est très important, puisqu'il s'agit d'un sport à jugement et que cela peut avoir une influence positive.
"Ne pas empêcher nos coureurs de gagner"
Des coureurs vont-ils s'aligner sur plusieurs disciplines à Turin ?
Julie Pomagalski sera seule dans ce cas, en géant parallèle et en snowboard-cross. C'est elle qui a souhaité le faire, elle a obtenu des podiums dans les deux disciplines cette saison (gagnante du snowboard-cross de Whistler le 8 décembre et 2e du parallèle de Kronpatz le 15 janvier). Il y a aussi le cas de Sophie Rodriguez, qui faisait du half pipe et du cross. Elle a choisi le pipe. Nous respectons son choix.
Comment évaluez vous le potentiel de médailles françaises à Bardonecchia ?
Je dirais de trois à sept médailles. Le chiffre de sept n'est pas prétentieux. Si j'annonçais moins, ce serait que je ne respecte pas mes coureurs. Ils me diraient «hé, mais tu m'as oublié dans tes prévisions !». C'est certain que nous pouvons faire un beau score aux Jeux. Tout le monde nous attend. Nous, l'encadrement, nous faisons le maximum pour ne pas empêcher nos athlètes de gagner. Notre premier rôle est donc de ne pas les placer dans des conditions défavorables. Ensuite, nous tentons d'amener des petits plus. Mais c'est avant tout le coureur qui fait la performance. Il faut relativiser la pression, le mieux est parfois l'ennemi du bien. Restons vigilants.
La structure de l'encadrement des coureurs a changé. Pouvez-vous nous expliquer comment ?
Il y a cinq entraîneurs nationaux : Xavier Rolland pour le parallèle, Nicolas Conte pour le cross (il a fait les Jeux de Nagano) avec Pierre Garnier et Nicolas Didry et Jean-Philippe Garcia pour le half pipe. Jusqu'à l'année dernière, les coureurs français fonctionnaient dans des systèmes privés. Ils constituaient ou intégraient un Team, choisissant et payant eux-mêmes leurs coaches, négociant les contrats avec les sponsors. Depuis la saison 2004-2005, nous avons mis en place une équipe de France au sens classique, avec un encadrement national choisi par nous et des moyens mis en place par l'AFS (Association Française de Snowboard), le ministère et nos sponsors. Ce nouveau système continue à se construire. Nous gérons la transition tout en prenant en compte le professionnalisme, le sens des responsabilités de nos athlètes. Cela se passe bien. Nous tournons avec deux ou trois kinés, un technicien, nous faisons avec nos moyens et nous ne nous en sortons pas top mal.
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karine Ruby, trois Jeux, trois médailles? |
Un aboutissement. Les «riders» ont le même ressenti que n'importe quel sportif. S'ils vont aux JO, c'est pour obtenir une consécration. Regardez Karine Ruby ! Elle a un palmarès long comme ça, un nombre incalculable de globes de cristal, deux médailles olympiques, elle a tout gagné, elle s'est gravement blessée, d'abord le genou, puis les vertèbres l'an dernier. Et elle est là, elle est repartie, elle a la «banane», elle montre son envie. Alors je le répète, notre premier rôle sera de ne pas l'empêcher de gagner !